Hope is a christmas gift (Diana)

Elle avait les yeux qui brûlaient, d'avoir lu trop de dossier, surligné trop de mots, bu trop de café. Elle y avait passé la nuit, à se plonger à corps perdu dans tout ce qui lui tombait sous la main, dans l'espoir de ne pas trop penser à lui. Pourtant, il campait dans son crâne, chaque seconde de chaque jour, et aucun dossier, aucune lecture, aucun jogging effrénée n'était assez efficace pour effacer son image incrustée sous ses paupières. Elle posa son stylo, une seconde, pour venir frotter ses yeux, son front, son visage entier, puis sa nuque. Elle était à bout, tant moralement que physiquement, et elle n'avait aucune idée de combien de temps elle supporterait encore la situation. Elle ferma les paupières, une seconde, qui sembla durer une éternité, puis son regard se porta sur son téléphone, l'envie d'appeler Walt qui lui filait les fourmis dans les doigts. C'est à ce moment-là, alors qu'elle fixait l'écran noir de son smartphone, indécise, nageant au milieu des doutes, que les coups retentirent à la porte. Elle ne voulait voir personne, aujourd'hui. Alors elle resta silencieuse, dans l'espoir que le voisin, sa sœur, le facteur ou quiconque la dérangeait perdrait patience et s'en irait. Mais ça n'était pas n'importe qui, derrière le panneau en bois, et elle n'eut pas besoin d'aller voir pour comprendre. Elle reconnaissait Liv à son poing ferme qu'elle aimait écraser sur la porte. Elle soupira, esquissant un sourire à sa remarque, et se leva, lente, jusqu'à atteindre la porte. Elle l'entrouvrit, juste de quoi laisser voir son visage, et soupira. - T'es entrain de martyriser ma porte, Liv. Elle leva un sourcil, l'expression neutre, les traits sans doute tirés par la nuit blanche qu'elle avait passé à fixer les rayons des lampadaires qui se reflétaient sur le plafond, à se tordre l'esprit dans des dossiers dont personne ne voulait, à se recroqueviller sous les draps. Pourtant, elle était heureuse de la voir, Liv. Elle la fatiguait, par son énergie trop débordante, sa bonne humeur constante, mais elle était l'une des rares personnes qui l'évitait de sombrer. Même sa sœur avait abandonné. Liv, elle, elle débarquait à l'improviste, armée de ses yeux qui pétillent. - Qu'est-ce que tu fais là ?

Son poing ne cesse de percuter la porte de sa meilleure amie, elle ne lâchera pas l’affaire. –elle ne le fait jamais. Sa volonté atteint son but lorsqu’elle sent le bois se dérober sous sa main, la porte s’ouvre suffisamment pour que Liv aperçoive le visage de Diana. Un visage fatigué, presqu’endolori par les sentiments. Liv hausse les épaules à la remarque de son amie, elle s’en fout de cette plaque de bois. Elle aurait du l’assassiner, ça aurait peut-être poussé Diana à reconsidérer le fait de retourner à SoHo, avec Walt. Liv n’est pas dupe, elle l’aime encore de trop pour abandonner cette histoire qu’est leur couple ; elle le sait, sinon elle ne serait pas dans cet état-là. Qu'est-ce que tu fais là ? « J’ai besoin d’un lutin pour porter mes achats de Noël » dit-elle d’un ton faussement hautain, à croire qu’elle serait une grosse riche qui dévaliserait Bloomingdale’s accompagnée par une horde de larbins surchargés de sacs. La gorge de Liv lâche un rire tout en finesse afin de détendre les traits tendus que le bâillement de porte lui laisse entrevoir. « Plus sérieusement, j’aimerais que tu m’accompagnes pour mon shopping de Noël…. » Un sourire sincère s’installe sur ses délicieuses lèvres rouges avant de retrouver son petit air taquin « … et peut-être que je pourrais t’aider à trouver mon cadeau ! » Un clin d’œil conclut son discours, il fallait qu’elle revienne sur une touche d’humour. Charly déteint sur elle, son humour à deux balles qui la séduit malgré tout. Le regard de Liv se fait à présent plus insistant, un refus de la part de Diana n’est pas envisageable. En fait, elle n’avait même pas imaginé ce refus qui est tout à fait probable. Elle n’avait pas préparé d’autres discours convaincants, notre agent ne serait cependant pas à cours d’idées pour trainer son amie hors de cet appartement. « Mon taxi attend...»

Liv, elle n'abandonnait jamais. Et parfois, elle tapait sur les nerfs de Diana, à trop vouloir en faire, à insister, mais aujourd'hui, elle lui était reconnaissante, au fond, de massacrer sa porte d'entrée à coups de poing. Elle n'en pouvait plus, était perdue, et Liv était assez bien placée pour savoir qu'il était temps qu'elle arrête de se morfondre dans son deux pièces impersonnel qu'elle détestait plus que tout dans ce monde. Elle se mordit la lèvre pour ne pas rire à son excuse, si Livesque qu'elle ne pouvait qu'en rire, mais ne voulait pas s'avouer vaincue si vite. Pourtant, elle l'était. Elle arqua un sourcil. - T'as qu'à demander à Charly. Il fait bien mieux le lutin que moi. Elle plissa les paupières, taquine, amusée, soulagée de l'avoir en face d'elle, ses grands yeux et son enthousiasme sans limites. Diana appuya sa tempe contre le bord de la porte, secouant doucement la tête, un demi-sourire au visage, incapable de le garder caché. Elle était toujours calme, Diana. Presque froide, fermée souvent, elle savait relever le menton, elle s'imposait, en un regard. Elle feignait, souvent, avec tout le monde, mais avec Liv, elle n'en avait jamais été capable. Elle resta silencieuse, un moment, peut-être pour faire durer le suspens, parce qu'elle savait, et Liv aussi, qu'elle ne pourrait rien refuser à sa meilleure amie. Elle avait besoin de ça, d'une sortie entre copines, à se faire bousculer par les gens pressés. Elle prit une grande inspiration avant de lâcher un soupir des plus dramatiques, et ouvrit la porte. - Ok, c'est bon. Juste parce que j'ai de la peine pour le pauvre taxi qui poireaute en bas. Elle se détacha de la porte pour aller fouiller dans son sac afin d'y trouver une tenue plus convenable que le jogging qu'elle portait. Elle n'avait jamais défait sa valise, ici, elle n'avait jamais pu s'y résoudre. Walt lui manquait, sa maison lui manquait, et quelque part, ne pas s'installer convenablement ici l'empêchait de faire une croix sur son chez elle. - Mais hors de question que je porte tes sacs, t'es bien assez grande pour le faire toi-même. Elle enfila rapidement un jean, un pull, des bottines et attrapa son manteau et son sac avant de faire irruption dans le salon. - On y va? Ton taxi attend. Elle sourit légèrement, taquine, presque l'envie de lui tirer la langue comme le feraient les enfants, et attendit que Liv sorte pour fermer derrière elle.