(cole) every night

Elle avait l'impression de s'être endormie deux minutes plus tôt. Trois coups, frappés à la porte d'une main lourde mais lente, obligèrent Maisy à ouvrir les yeux. Son regard se posa sur le réveil à quelques centimètres de son visage. Il affichait 2h07. La journée avait été longue, elle avait enchaîné les services sans même prendre de pause, alors elle s'était endormie en quelques minutes seulement. Jusqu'à ce qu'il la réveille. Dans une grande inspiration, elle se leva difficilement, et traversa le petit appartement qu'elle occupait. En quelques secondes, elle avait déjà atteint la porte d'entrée, et l'ouvrit à moitié. Aucune surprise, il n'y avait qu'une seule personne capable de frapper à cette heure-là. Cole, la lèvre en sang et des ecchymoses sur tout le visage, se tenait debout sur le palier. Maisy appuya sa tête sur l'encadrement de la porte, et soupira. - Cole. Il avait l'air mal en point. Mais pas guère plus que les trois fois précédentes. Elle le fixa un moment, détaillant chaque parcelle de son visage meurtri, et malgré toutes les questions qui traversaient son esprit à chaque fois qu'elle lui ouvrait la porte, elle se décala pour le laisser entrer. - Installe-toi sur le canapé, je vais chercher ce qu'il faut. Elle n'avait aucune idée de ce qui le mettait dans cet état, et encore moins pourquoi elle soignait ses plaies quand bien même elle pourrait se contenter de l'envoyer balader. Mais malgré elle, Maisy aimait la sensation de se sentir utile. Et chaque fois qu'il avait débarqué au milieu de la nuit, le visage en sang, elle s'était occupée de lui avec une patience et une douceur infinie. Et ce soir-là ne serait qu'une autre nuit à ajouter à la liste. Elle s'assit à près de lui, posant la trousse de secours sur la petite table. - Laisse moi voir. Elle s'approcha un peu plus, et attrapa le visage de Cole entre ses mains, inspectant chaque centimètre de celui-ci. L'arcade ouverte, un bleu sur la joue et la lèvre inférieure en sang. Elle fronça les sourcils, et plongea son regard dans celui de Cole. - Est-ce que je dois m'inquiéter de l'état de l'autre gars ? Maisy avait sa petite idée quand à la provenance de ces ecchymoses. Elle en avait vu, des hommes se battre après un verre de trop à la sortie d'un bar. Et en dépit de sa détestation de la violence, elle ne pouvait s'empêcher de l’accueillir chez elle à chaque fois qu'il en avait besoin. Elle ne le connaissait qu'à peine, et malgré cette différence entre elle et lui, elle ne pouvait refouler sa curiosité naturelle.

Les mains endolories par les coups frappés, les jambes lourdes d'être resté en position verticale la majeur partie de la journée, le visage endoloris par des ecchymoses et des coupures, d'aucuns pourraient dire que je ne suis pas au mieux de ma forme. Pourtant, je me sens bien. Vivant. Je respire. J'arrive sur mon palier, et c'est tout naturellement que je me dirige vers la droite, à l'exact opposé de l'entrée de mon appartement qui, elle, est située à ma gauche. Je frappe, trois fois, assez fort pour qu'elle m'entende. Elle doit probablement être couchée... Au bout de quelques secondes d'attente, j'entend des bruits de pas dans l'appartement, puis la serrure qu'on déverouille. Cole. . Elle a l'air fatiguée, sa tête repose sur le cadre de la porte. On dirait un petit chat qu'on vient de réveiller. Je culpabiliserais presque de venir l'emmerder régulièrement si je n'étais pas aussi euphorique. Je lui répond avec un grand sourire. Salut toi. J'te dérange pas j'espère. Elle ne prend pas la peine de me répond pas et me laisse rentrer. C'est qu'elle commence à s'habituer la petite. Installe-toi sur le canapé, je vais chercher ce qu'il faut. Je rentre, ferme la porte et va m'installer sur son canapé qui a déjà accueuilli mon cul amoché plusieurs fois, et pose mon sac à dos à mes pieds. Les bras étendus sur le dossier, je penche la tête en arrière et ferme les yeux, essayant de calmer mes nerfs à vif. Je me redresse lorsqu'elle revient, équipée comme une vraie petite infirmière. Laisse moi voir. Elle prend mon visage entre ses mains, examinant chacune de mes blessures avec attention. Ses sourcils se froncent, je sais qu'elle n'aime pas la violence, elle m'en a déjà parlé avant. Mais ça me fait toujours sourire de la voir se faire du soucis. J'en ai vu d'autres, je survivrais. Est-ce que je dois m'inquiéter de l'état de l'autre gars ? Je hausse les sourcils et lève les yeux au ciel. T'inquiètes pas, je prendrais de ses nouvelles lors de notre prochaine virée shopping. Je lui lance un sourire ironique. La prochaine fois, tu pourrais me sortir le grand jeu, genre déguisement d'infirmière sexy ? Je sors une pomme de mon sac et croque dedans, en haussant un sourcil. Je la taquine, mais c'est vrai que ça pourrait être sympa. Allez docteur, qu'est-ce que vous pouvez faire pour rabibocher cette vieille gueule toute cabossée ? Je redresse les épaules et croise les bras sur mes genoux, prêt à endurer docilement tous les soins qu'elle voudra bien me prodiguer.

La première fois qu'il avait frappé chez elle, Maisy avait paniqué. Elle avait ouvert la porte sur un voisin qu'elle croisait rarement, en sang et se tenant les côtes. Évidemment, elle avait cru à un accident. Alors elle l'avait soigné. Et quelques jours plus tard, il avait frappé de nouveau. Ça s'était répété plusieurs fois. Certains jours, il était plus mal en point que les autres. Mais toujours, il gardait ce sourire charmeur, arrogant, prétentieux qui donnait envie de le gifler. En théorie oui, il la dérangeait. Qui appréciait d'être réveillé au beau milieu de la nuit pour jouer à l'infirmière avec un semi-inconnu? Elle ne répondit pas et fila dans la salle de bain. En jetant un coup d'oeil dans le miroir, elle se recoiffa brièvement, aplatissant les mèches rebelles. Elle avait les mains chaudes, et pourtant elle avait l'impression que lui était brûlant. De fièvre, d'adrénaline, elle n'en savait rien, elle n'était pas médecin. Elle stoppa ses gestes un instant pour le fixer. Il faisait du sarcasme, même dans un moment pareil. Elle soupira, se concentrant à nouveau sur ses blessures. Et puis, elle rit. Un petit rire sincère, simple et bref. - Si tu voulais une infirmière sexy, je suis sûre qu'il y en a plein à l'hôpital. Des blondes, rousses, brunes. De tous les genres.Il croqua dans sa pomme comme si de rien n'était. Comme si le sang ne s'écoulait pas de son arcade, comme s'il n'était pas deux heures du matin. Il ne semblait même pas avoir bu. - Allez docteur, qu'est-ce que vous pouvez faire pour rabibocher cette vieille gueule toute cabossée ? Elle lâcha de nouveau un petit rire, puis se recula légèrement. - Enlève ton t-shirt. Elle était très sérieuse, ça sonnait comme un ordre, c'en était un, mais elle savait qu'il ne manquerait pas l'occasion d'en placer une. - Je veux voir si t'as des côtes cassées. Ou des bleus. Ou quoi que ce soit qui vaille la peine d'être vu.

J'entendis son rire. C'était rare, mais j'aimais bien. Comme les carillons qu tintent lorsque la brise se lève. Si tu voulais une infirmière sexy, je suis sûre qu'il y en a plein à l'hôpital. Des blondes, rousses, brunes. De tous les genres. Mes sourcils se froncèrent. Je m'étais déjà rendu à l'hopital quelques fois, et les infirmières qu'on y trouvait n'avaient rien de celles fantasmées dans l'imaginaire collectif. Et pire que tout, la plupart portaient des crocs. Quelle horreur.  Enlève ton t-shirt. Mes lèvres se fendirent d'un grand sourire, près à débiter toutes les conneries salaces qui me passaient par l'esprit. Mais elle ne m'en laissa pas le temps. Je veux voir si t'as des côtes cassées. Ou des bleus. Ou quoi que ce soit qui vaille la peine d'être vu. Je haussais les épaules, et entreprit laborieusement de passer mon t shirt par dessus ma tête, le geste étant rendu assez difficile par ma main droite qui avait pris un choc sévère lors de l'affrontement. La tête toujours engoncée dans le col, je parvins néanmoins à articuler. T'as vu ce corps de rêve ? Tout ça ça vaut la peine d'être vu très chère, et encore plus quand c'est en bon état. Je parvins finalement à s'extraire laborieusement du vêtement, réduisant à néant le peu de tenue que mes cheveux pouvaient encore avoir. Je jetais un rapide coup d'oeil à mon torse, qui était relativement en bon état. Il faut dire que je n'avais pas vraiment laissé de chance à mon adversaire ce soir. Le pauvre devait être dans un bien plus piteux état. Mon fruit terminé, j'entrepris de marquer un panier dans la poubelle située à quelques mètres de moi. Le trognon rentra sans problème, et je ne put m'empêcher d'afficher un sourire victorieux. Trois points ! Je reportais mon regard sur mon hotesse, fier comme un coq. Puis, désignant mon corps d'une main nonchalente, je lui demandais. T'aimes ce que tu vois ? Tout en affichant mon traditionnel regard aguicheur. Je savais qu'elle allait me rembarrer. C'était notre jeu, et ça m'amusait de la voir parfois rougir. Je suis tout à toi. Puis je renversais la tête en arrière, et fermais les yeux, attendant qu'elle me panse mes blessures.

C'était un idiot, un idiot avec un sourire ravageur, une estime de soi bien trop grande pour ses épaules, et un œil au beurre noir. Il fronça les sourcils, ce qui la fit doucement rire. Pour avoir failli en être une, elle savait à quoi ressemblait les infirmières. Il était rare de tomber sur une bombe norvégienne au décolleté plongeant. La plupart traînaient des pieds dans leurs crocs, les mains dans les poches et les cheveux attachés rapidos dans ce qui ne ressemblait même pas à une queue de cheval. Elle le vit, son sourire pervers lorsqu'elle lui demanda d'enlever son t-shirt. Alors aussitôt, elle poursuivit sa phrase, ne lui laissant pas le temps de caser une remarque. Elle remarqua sa main blessée seulement lorsqu'il essaya d'enlever son t-shirt. Ça semblait mauvais, et elle nota intérieurement de bien regarder ses phalanges. Puis son regard se porta sur son ventre, son torse, et les quelques bleus qu'il affichait. Elle pinça les lèvres, attendant qu'il se soit sorti du vêtement. - J'ai vu mieux, mais ça va. Elle lui lança un regard espiègle qu'il ne vit pas. Il parlait la tête encore coincée dans son t-shirt, alors elle ne pu s'empêcher de l'aider à le retirer. Il en sorti les cheveux ébouriffés, et Maisy se retint de rire. - Ok, voyons voir. Elle n'eut pas le temps de faire quoi que ce soit, qu'il jeta son trognon de pomme dans la poubelle. - Arrête de bouger. En levant les yeux au ciel, non sans rougir un peu, elle plaça ses mains sur ses côtes, délicatement, de peur – et c'était naïf, de lui faire mal. Elle appuyait doucement sur sa peau, à la recherche de côtes brisées. - Tu me dis si je te fais mal. Ses mains descendaient le long de ses côtes, puis elle frôla des doigts chacun des bleus. - Je ne crois pas que t'aies de côtes cassées. C'est déjà bien. Elle appliqua méticuleusement de la crème sur les ecchymoses, puis entreprit de nettoyer le sang qu'il avait sur le front. - Attention, ça va piquer. Elle appliqua l'antiseptique, et appliqua des strips sur la coupure. Elle fit une pause, le regardant, alors qu'il avait toujours les yeux fermés. Il avait l'air… Heureux. Bien. Il venait de se faire frapper, et il semblait heureux. Elle soupira et toucha sa lèvre meurtrie, coupée, ce qui le fit sursauter légèrement. - Désolée. Elle attendit qu'il relève la tête, et désigna sa main droite. - Fais voir ta main.

C'était agréable de la sentir me toucher. Comme un petit massage délicat. Toute la fièvre de la soirée passée commençait à redescendre doucement, je me sentais apaisé. Tu me dis si je te fais mal. Elle avait lancé ça d'un ton inquiet, comme si ses petites mains délicates pouvaient réellement me faire mal. Je souris. T'inquiètes pas, j'en ai vu d'autres. Je la sentais appuyer sur mes cotes, l'une après l'autre. Je ne me faisais pas trop de soucis de ce côté là, j'avais appris à reconnaitre lorsque j'étais salement amoché, et ce n'était pas le cas. Pas aujourd'hui en tous cas. Je ne crois pas que t'aies de côtes cassées. C'est déjà bien. Elle applique de la crème sur chacun de mes bleus, doucement, veillant à ne pas m'amocher plus que je ne l'étais déjà. Tu peux y aller franco, tu sais ? Je ne suis pas en sucre. Je disais ça plus pour fanfaronner qu'autre chose. Ses mains quittèrent ma peau brulante pour quelques instants. Attention, ça va piquer. Je ne pus réfrener un petit ricanement. Ca va piquer ? Sérieusement ? Elle me prenait pour un mioche qui a fait une chute de vélo ou quoi ? Mais bon, je dois admettre que cette sollicitude est assez mignonne. Le spray frais me faisait plus de bien qu'autre chose. Je dois bien admettre que la petite sensation de picotement n'était pas des plus agréables, mais la pointe de fraicheur qu'il apportait à ma peau était la bienvenue. Puis, elle entreprit de nettoyer mon visage. Probablement la partie de mon corps qui avait subi le plus de dégats ce soir. Toujours les yeux fermés, je sentis au bout d'un moment comme une brulure au niveau de ma lèvre inferieur, qui me fit sursauter malgrès moi. Désolée. Je lui fis un signe de la main pour lui montrer que tout allait bien, avant de me redresser et d'ouvrir les yeux. Elle avait vraiment l'air extenuée, et je me senti coupable pendant un quart de seconde. Fais voir ta main. Docile, je la posais sur mes genoux. C'est vrai qu'elle m'avait l'air plutot amochée. Mais rien de trop grave. Ce doit simplement être les chocs répétés qui l'ont légèrement ankylosée. J'pense qu'un petit bisou serait parfait pour me guérir. Je lui souris, tout en levant les sourcils façon beau gosse, petite technique de seduction dont je suis le seul à détenir le secret. Puis, maintenant que je suis plus ou moins réparé, je lui demande. T'as quelque chose à boire ? Histoire de fêter une nouvelle réussite de mademoiselle la presque infirmière ?

Elle sentait la respiration de Cole se calmer, et ce n'est qu'à ce moment-là qu'elle se rendit compte à quel point son cœur battait vite. Il en avait vu d'autres, ça c'était plutôt évident. Elle avait ce réflexe idiot, ou cette nature naïve de faire très attention à ne pas appuyer trop fort. Elle n'aurait même pas la force de lui faire un bleu si elle le cognait, du haut de ses un mètre soixante, et pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de retenir le peu de force qu'elle avait. - Désolée, c'est un réflexe. Je veux juste pas risquer de te faire mal. Elle se mordit la lèvres lorsqu'elle le prévint que ça allait piquer. Il venait de se prendre une dérouillée, un peu de picotements ne le ferait aucun mal. Peut-être même qu'il ne les sentirait même pas. Il avait cessé de bouger lorsqu'elle examinait et soignait son visage, et se redressa lorsqu'elle lui demanda de lui montrer sa main. Elle allait s'étonner de l'absence de répliques de tombeur dans les deux dernières minutes, mais elle eut à peine le temps d'y penser qu'il en casa une. - J'pense qu'un petit bisou serait parfait pour me guérir. Elle lui lança un regard mi-exaspéré, mi-amusé, mais surtout plutôt fatigué. - Si c'était aussi simple ! Elle attrapa sa main et toucha – toujours du bout des doigts, chacune des phalanges. C'était sans doute la partie de son corps qui avait le plus pris, et elle se demanda combien de fois il avait frappé avec ce poing. - Je vais t'apporter de la glace, pour ta main. Elle sourit et se leva vers la cuisine, à à peine deux mètres du canapé. - T'as quelque chose à boire ? Histoire de fêter une nouvelle réussite de mademoiselle la presque infirmière ? Elle lâche un petit rire et le corrige. - Ex-presque infirmière. Ça fait bien longtemps que soigner n'est plus dans mes projets. Elle avait prononcé cette dernière phrase doucement, un peu comme un regret. Elle n'avait aucune idée de la raison qui l'avait poussée à arrêter la fac, mais elle aimait sa vie d'aujourd'hui, alors elle se disait qu'elle avait fait le bon choix. - J'ai de l'eau. Du thé, du café. Elle hésita une seconde, puis poursuivit. - J'ai un peu d'alcool, mais je pense que t'as eu ta dose pour ce soir. Elle espérait au fond qu'il se battait seulement après avoir bu, et non qu'il provoquait n'importe qui, n'importe quand, même sobre comme un bébé.

Je me levais également, pour aller l'aider dans la cuisine. Et pour me dégourdir un peu les jambes, quoi que les deux enjambées que j'avais à faire pour passe d'une pièce à l'autre ne m'étaient pas d'un grand secours. Je m'accoudais au plan de travail, la regardant fouiller pour me trouver de la glace. Ma main va très bien, tu sais... Demain elle sera comme neuve. Elle s'inquiétait trop. Mais bon, je l'avais bien cherché aussi, à la tirer de son lit à des heures pas possible pour me faire rafistoler. Je me demandais si elle savait pourquoi j'étais dans cet état là. Probablement pas. Elle n'aurait jamais accepté de me soigner sinon. Surtout si elle avait vu la gueule du mec en face de moi. Après que je lui ai demandé si elle avait quelque chose à boire, elle se mit à énumérer toutes les boissons de grand mère qu'elle avait en stock. Si j'voulais boire du thé, je serais allé à la maison de retraite chérie... Elle hésita quelque peu, avant de lui répondre. - J'ai un peu d'alcool, mais je pense que t'as eu ta dose pour ce soir. Je restais interloqué un bref instant. J'avais l'air d'avoir bu ? Je vais finir par me vexer... J'ai l'air si fatigué que ça ? Je levais les sourcils, et, sans attendre de réponse de sa part, me servais une des bières de son frigo. Je fus d'ailleurs un peu surpris d'en trouver la... T'as ces trucs depuis combien de temps dis moi ? Je risque de me faire empoisonner ? J'avais dit ça sur le ton de la plaisanterie, je me doutais que mademoiselle ne laisserait rien dans son frigo qui avait dépassé la date limite de consommation, fut-ce de quelques heures. Puis, sans me géner, comme d'habitude en fait, j'entrepris de fouiller dans ses tiroirs pour trouver de quoi décapsuler ma boisson. Pas question de me déglinguer le détentier en l'ouvrant avec mes dents. Allez, viens, on va la partager. Je retournais m'assoir sur le canapé sans attendre sa réponse, tout en buvant une longue gorgée de liquide. Putain, ce que ça fait du bien ! Mes fesses se reposèrent dans le canapé, à l'exact endroit que j'avais délaissé quelques minutes plus tôt. Puis, je tendis la bouteille devant moi, invitant mon hôte à s'en saisir. Ça te fera le plus grand bien ma belle. Et c'était peut-être vrai. Il fallait qu'elle se détende. Je n'allais pas la manger. Enfin, c'était pas prévu pour ce soir en tous cas.

Il gardait toujours ce calme, cette ironie dans ses paroles, toujours ces plaisanteries qui ne cessaient jamais. Maisy le fixa, en silence. - Non, Cole. Ta main ne va pas bien. Non mais t'as vu ton visage? T'as bien de la chance d'être encore debout, après toutes les fois où tu t'es pointé chez moi dans cet état ou pire. Elle s'inquiétait trop. Bien trop pour un mec qu'elle connaissait à peine. C'était sans doute la fatigue qui la poussait à lui faire la morale. Elle se frotta les yeux, et lui lança une grimace moqueuse lorsqu'il mentionne la maison de retraite. Elle avait une petite vie tranquille, elle aimait vivre ainsi, et il était bien le seul élément perturbateur dans son quotidien lisse. Il semblait étonné qu'elle mentionne l'alcool qu'il avait ingurgité cette nuit, et dû se concentrer sur autre chose pour ne pas que ça la tracasse toute la nuit. - T'en fais pas, même fatigué et amoché, t'es beau comme un camion. Elle lui tapota le haut du crâne comme si elle parlait à un enfant, en souriant. Sans gêne - mais elle ne l'en blâmait pas, il ouvrit son frigo pour en sortir une bière, la dernière bouteille. - Tu peux y aller, c'est ok. Enfin je crois. Elle lui sourit ironiquement, et attendit qu'il soit installé sur le canapé pour lui jeter la poche de glace. - J'insiste. Ta main va pas désenfler si tu mets pas de glace. Puis elle le rejoignit, s'asseyant près de lui sur le petit canapé deux places. Il était deux heures du matin, peut-être trois maintenant. Elle était en pyjama - un short et un t-shirt à l'effigie d'un groupe de rock qu'elle n'écoutait même pas, elle venait de rafistoler son voisin de palier qu'elle connaissait très peu et pourtant, la situation paraissait naturelle. Elle ouvrit la bouche puis la referma aussitôt, et le fixa un instant. - Tu sais, je suis pas une sainte ou une nonne ou je ne sais quoi que tu penses que je suis. J'en ai bu, des bières, figure-toi. Et plus d'une. T'imagine même pas ce que j'ai dans le ventre. Elle avait lancé ça d'un ton fier, peu crédible au vu de sa carrure frêle et de sa fâcheuse habitude à jouer les mamans, mais c'était vrai. Elle attrapa la bière et en bu une gorgée, avant de la lui rendre (il était trois heures du matin, un mercredi, elle n'allait pas non plus la vider), et s'assit en tailleur. - Alors. Parle-moi de toi. Qui est le grand Cole Gardner, mis à part mon voisin de palier. Et puis, elle ajouta. - C'est vrai, on se connaît même pas en fait. Si ça se trouve t'es un psychopathe qui attend le bon moment pour m'égorger.